La zone de douleur acceptée… la tolérance à la douleur de l’autre… Accepter !
Chaque jour, je rencontre des êtres souffrants dont l’âme saigne, dont le corps essaie d’expulser la douleur, une douleur indicible, cette torture psychique qu’apportent les hallucinations, le deuil d’une vie qui ne pourra pas se vivre.
La peur, l’angoisse, la mort qui rôde dans les pensées en permanence… l’indicible douleur d’être, d’être autre qu’attendu, autre que rêvé, autre que normal…
A côté d’une plaque dont personne ne sait même où elle se trouve, à l’ouest de tous le rivages connus, perdus dans un monde de fantômes malveillants, de voix ricanantes qui détruisent toute velléité d’estime de soi… comme des rires démoniaques qui envahissent la tête, des images, des sensations, des perceptions anxiogènes…
Une douleur intolérable, indicible et dont on ne peut parler à personne, même pas au psychiatre qui de suite, proposeraitd’augmenter la dose de neuroleptiques pour calmer ce délire, pour anesthésier une douleur inentendable et éloigner encore un peu la personne dans un brouillard d’imperception.
Un jour, elle vient vers moi en panique… elle me raconte qu’elle est dans un cimetière et que des êtres démoniaques sont en train de danser autour d’une tombe en lui disant que c’est sa place… qu’elle doit se suicider vite pour trouver sa place.
Un instant, je reste au bord de ce monde sans savoir que faire… Elle est vraiment mal et je ne sais pas que faire… je me trouve entre deux rives et j’hésite… Aujourd’hui, quand je vous le raconte, j’ai vraiment la sensation exacte de l’existence de ces deux mondes parallèles et je me trouve prise dans cet espace infime entre nos deux réalités… Je comprends vite que je ne pourrai pas la faire venir dans mon monde et pourtant je ne sais pas que faire pour accueillir sa douleur et ne pas la tuer par mon refus de cette double réalité…
Alors, je prends mon courage à deux mains et sans réfléchir, je saute dans cet autre monde et j’atterris dans le cimetière… je les vois ces esprits maléfiques, je vois la pierre tombale et je lui dis… regarde bien, qu’est-il écrit sur la pierre ? y a-t-il ton nom ? Elle me regarde interloquées puis elle regarde la pierre et me dit non, il n’y a pas mon nom, il n’y a pas de nom… Alors je lui dis viens, retourne-toi et nous allons repartir vers la porte du cimetière et les laisser ricaner, ce n’est pas ta place ici, ton nom n’est pas sur la pierre… Et lentement nous nous sommes éloignées jusqu’à ce que le vacarme des voix ce soit éteint… symboliquement j’ai ouvert la porte du bureau et nous sommes sorties…
Je ne sais pas ce que j’ai fait vraiment, je n’ai pas eu d’autre choix que de faire comme ça pour accueillir sa douleur, la faire mienne pour qu’elle s’éloigne au moins un moment.
Il y a ce moment du buvard qui refuse de pomper les tâches du sort sans scrupules
Et la corniche fae au vide devant soi
Quel élastique existe dans le saut qui ne joue pas pour de faux ?
Alain
J’aimeAimé par 1 personne